Il existe des sujets qui, de manière universelle, suscitent l’intérêt et la réflexion, au point que chacun se sent légitime pour en parler. Parmi eux, celui de la Nature occupe une place particulièrement symbolique.
À bien des égards, elle représente bien plus qu’un simple cadre ou concept : elle est perçue comme le fondement même de la vie, un idéal d’éthique et d’harmonie. Mais qu’entend-on réellement par « naturel » ? Ce terme, souvent employé sans en mesurer la portée, évoque l’idée d’un équilibre originel, bénéfique et essentiel, que l’humanité s’efforce tant bien que mal de retrouver.
Parmi les esprits les plus éclairés qui ont traité de ce sujet, il en est un que son chemin est passé par la commune de Confignon : Jean-Jacques Rousseau. L’histoire nous raconte en effet que celui-ci quitta Genève avant même ses seize ans (!) et fut accueilli par le curé de Confignon, Benoît de Pontverre (qui a par ailleurs donné son nom au chemin éponyme).
Ce passage marqua probablement le début d’une réflexion profonde sur les rapports entre l’homme et la Nature, un thème central de son œuvre. Pour Rousseau, la Nature est bien plus qu’un refuge ou une source d’inspiration : elle constitue un guide pour renouer avec notre véritable essence. Il y puise l’idée d’une « authenticité », cette quête d’un équilibre intérieur et d’une harmonie avec le monde, que nous pourrions aujourd’hui qualifier de « retour à soi ». Mais ce retour à la Nature ne se limite pas à un idéal personnel : il implique également une réconciliation collective avec notre environnement.
En effet, ce retour à la Nature se veut également être un mouvement vers une écoute plus attentive de ce qui nous entoure, à fortiori de ce qui nous apparaît comme inanimé ; car il nous est bien entendu très aisé d’imaginer sans trop se tromper que les mammifères et autres membres du règne animal sont dotés d’une forme d’intelligence, dans le sens où ceux-ci sont bel et bien acteurs d’échanges d’informations (aussi basiques soient-elles). Il nous est néanmoins possible de pousser le raisonnement un peu plus loin en affirmant que les réseaux d’informations entre végétaux, tels que ceux que l’on retrouve en forêt par exemple, sont également riches d’enseignements et finalement pas si difficilement accessibles.
L’idée derrière ces circonvolutions lexicales est que nous devrions probablement faire l’effort de ralentir le rythme que nos modes de vies nous imposent et se mettre à l’écoute de cette Nature qui nous habite et nous entoure. Cet effort conscient de se mettre pour ainsi dire en résonance avec la Nature serait à n’en pas douter fort fécond et bénéfique, non seulement individuellement mais aussi et surtout collectivement.
Il n’aura échappé à personne que les milieux naturels sont fortement mis sous pression du fait de l’urbanisation contemporaine. Bien que la réalité du XVIIIème siècle soit diamétralement différente de celle qui est la nôtre aujourd’hui, on peut néanmoins tirer des hypothèses (même si difficilement vérifiables) de ce que Rousseau aurait pensé de l’urbanisation moderne.
Il est probable que Rousseau n’aurait pas plaidé pour un retour pur et simple à l’état de nature, mais il aurait encouragé une société qui respecte davantage les besoins naturels de l’homme. Il aurait vraisemblablement prôné des alternatives à l’urbanisation moderne, comme des communautés plus petites, intégrées à la nature, où les individus vivent en équilibre avec leur environnement.
Il valoriserait certainement des modèles de développement durable qui permettent aux individus de retrouver une part de leur liberté et de leur authenticité, tout en préservant la nature. En effet, les modèles actuels de villes durables, avec des espaces verts, des modes de transport écologiques, et des architectures biophiliques, pourraient ainsi être plus en accord avec les idéaux de Rousseau.
En conclusion, le message que l’on pourrait retenir, à la lumière des réflexions de Rousseau et des défis actuels, est que la Nature ne se limite pas à un simple cadre extérieur à contempler ou à exploiter. Elle est aussi un miroir de notre propre essence, une ressource inestimable pour retrouver une harmonie intérieure et collective. Dans un monde où l’urbanisation semble nous éloigner de ce lien fondamental, le rappel de Rousseau nous invite à repenser nos modes de vie et nos structures sociales pour intégrer davantage de respect envers la Nature et ses équilibres.
Ainsi, l’avenir ne réside pas dans un retour nostalgique à l’état de nature, mais dans la création de modèles de coexistence plus respectueux. Cela inclut des communautés humaines capables de vivre en symbiose avec leur environnement, inspirées par une écoute attentive et humble de la Nature. À travers des choix collectifs tels que le développement durable, l’intégration d’espaces verts et la promotion d’architectures harmonieuses, nous pourrions redonner sens à l’idéal d’authenticité cher à Rousseau. Finalement, ce chemin vers un équilibre entre urbanisation et naturalité pourrait bien être notre meilleur héritage, tant pour nous-mêmes que pour les générations futures.
Sébastien Benoît
Habitant de Confignon & sympathisant Confignon.Ensemble
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